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Ma saison 2011 au Canada en tant que capitaine de bateau pour observer les baleines va connaitre un nouveau départ. En effet, les compagnies de bateaux et les autorités sur place ont publié un “Guide de pratiques éco responsables pour les capitaines de bateaux”.
Tous les acteurs souhaitent que “les activités d’observation de baleines dans le parc marin deviennent un modèle international pour la pratique responsable de l’observation des baleines”. Un gros défis mais je trouve la démarche intéressante. Il est dit dans ce guide plusieurs points :
1. Une industrie d’observation des baleines qui est responsable :
- sensibiliser le public à la conservation,
- minimiser les impacts des activités d’observation sur les baleines,
- faire le suivi de la ressource et de l’efficacité des mesures de gestion,
- adopter des pratiques responsables d’un point de vue environnemental, social et économique,
- travailler dans un esprit de concertation en regroupant les acteurs du tourisme, de la recherche et de la conservation.
2. Pour les passagers, le capitaine éco-responsable :
- Soigne son mot de départ,
- Présente le parc marin et le Règlement de façon positive,
- Fait participer les passagers à la recherche des baleines,
- Souligne la première observation de baleine,
- Diversifie le contenu de l’excursion,
- Sait rendre toute observation « intéressante »,
- Évite autant que possible les sites d’observation trop éloignés,
- Adapte son plan d’excursion aux conditions météos,
- A de l’empathie pour ses passagers,
- Prend les vagues de façon sécuritaire et confortable,
- Profite du retour pour passer un message de conservation.
3. Pour les baleines, le capitaine éco-responsable :
- Réduit sa vitesse et fait preuve de vigilance,
- Évite les concentrations de bateaux,
- Inclut au moins trois stations d’observation dans son excursion,
- Limite son temps sur un site achalandé : 30 minutes ou une « belle » observation,
- Travaille dans un esprit de communauté avec les autres capitaines,
- « Protège » l’observation des passagers à bord des autres bateaux et des visiteurs sur les sites terrestres,
- Autant que possible, reste immobile sur un site d’observation,
- Applique le Règlement même en dehors des limites du parc marin,
- Préserve une « bulle » autour du béluga et du rorqual bleu,
- Présente comme un privilège l’observation, même à distance, du béluga et du rorqual bleu.
4. Pour la sécurité et le professionnalisme, le capitaine éco-responsable :
- S’exprime envers tous avec politesse et courtoisie,
- À la radio maritime, tient des propos concis et utiles,
- Par temps de brume, ralentit et redouble de vigilance,
- Agit avec respect avec les autres utilisateurs du milieu,
- Rapporte sans délais les situations dangereuses à Trafic Escoumins,
- Exerce une vigilance particulière pour les kayaks dans les secteurs plus fréquentés,
- Lorsque requis, communique avec les chercheurs et les pilotes de cargos pour mieux planifier ses déplacements.
5. Au cours de l’excursion, le capitaine :
- Présente le parc marin et le règlement de façon positive,
- Présente l’estuaire : marée, eau salée,
- Souligne que la région est une destination pour plusieurs espèces de baleines migratrices,
- Mentionne qu’on y trouve une abondance exceptionnelle de nourriture,
- Attire l’attention sur la diversité du milieu (mammifères marins, oiseaux, proies en surface, etc.),
- Identifie les baleines et les phoques rencontrés,
- Parle du béluga, de son statut et de sa contribution personnelle au rétablissement de la population,
- Met en valeur le travail d’autres types d’acteurs du milieu rencontrés pendant l’excursion (pilote, garde de parc, chercheur, etc.),
- Utilise son vécu et son expérience,
- Présente d’autres attraits que les mammifères marins (ex. aides à la navigation, oiseaux, repères géographiques, etc.),
- Invite les passagers à se rendre dans des centres d’interprétation ou sur des sites terrestres pour en savoir plus.
Ensuite, le guide termine par les 10 "engagements"
que le capitaine s’engage de faire :
- Le capitaine indique aux passagers que l’excursion se déroulera dans le parc marin du Saguenay-Saint-Laurent, une aire créée pour protéger les baleines et leur milieu.
- Par ses comportements, le capitaine incite tous les utilisateurs à respecter le Règlement sur les activités en mer et du Guide des pratiques éco-responsables.
- Le capitaine planifie l’excursion de façon à faire vivre à ses passagers une aventure en milieu naturel, et non une visite au zoo ou une expérience sportive.
- Le capitaine communique avec professionnalisme et courtoisie avec ses passagers, ses collègues et tous les utilisateurs du milieu.
- Le capitaine génère un sentiment de privilège chez ses passagers, en soulignant que chaque excursion est unique, en valorisant la diversité des attraits et en puisant dans son vécu et ses connaissances.
- Le capitaine planifie ses déplacements et son positionnement sur le site de façon à « protéger » l’observation des passagers des autres bateaux et des observateurs sur les sites terrestres.
- Le capitaine adapte sa navigation et son plan d’excursion en fonction des conditions météos et des circonstances, dans un souci du confort des passagers.
- Le capitaine contribue à sa mesure aux efforts de recherche et de conservation, entre autres en signalant les baleines blessées, les espèces rares et autres incidents inhabituels dans le milieu.
- Le capitaine invite ses passagers à poursuivre leur découverte du monde des baleines au-delà de la présente excursion (sites d’observation terrestres, centres d’interprétation, autre excursion en mer, …).
- Le capitaine profite de l’excursion pour passer un message sur la fragilité du milieu et notre responsabilité pour le protéger.
Le parc où j’œuvre, demande un travail supplémentaire pour les capitaines, et pas uniquement de “piloter un bateau” ! Jusqu’ici et lors de mes voyages, je n’ai jamais lu ou entendu une telle initiative. Il faut dire que cet endroit est unique pour l’observation des baleines et les compagnies y travaillent depuis des années. C’est une INDUSTRIE des baleines ! Ces animaux rapportent de l’argent uniquement pendant quelques mois de l’année. Une tension est palpable en mer.
Ce que je souhaite c’est de ne plus voir en mer des comportements de capitaines jugés inacceptables, et de respecter les distances. Je connais mes attitudes en mer et mon respect de ces animaux. Lorsque vous lirez mon article intitulé “Quand les plaisanciers nuisent aux baleines… (aout 2010)», j’étais déjà horrifié de ce que je voyais en mer. Il y avait un véritable problème ! J’avais même pensé arrêter… Ce qui est dit dans ce guide, je le travaille tous les jours le mieux que possible. Je reconnais que la fatigue, le rythme de travail et le nombre de tour m’empêche de donner tous les jours le meilleur de moi-même. Surtout par temps de brume ! Mon coté environnementaliste, mes expériences en mer, la connaissance du lieu, mes voyages, apportent aux touristes un regard neuf sur les baleines. Pourtant, je dois progresser sur pleins de points et ce guide me le rappelle !
A bientot.
Samana, République Dominicaine, avril 2011.
Julien Marchal